La forêt me soigne

 

C’est une terre que l’on croit connue, elle ne l’est pas. Ne pas la croire conquise, faire en sorte qu’elle ne le soit jamais. Pour la capter dans sa plénitude il faut se laisser revenir aux temps immémoriaux, oser s’abandonner à des instincts proches de l’animalité. On ne s’y rend pas par hasard non plus, on y est appelé par des invocations que seule notre sensorialité s’est appropriée. Toujours se rappeler qu’elle est fille d’un archipel du premier matin du monde. De cette aube, elle œuvre en dépositaire du précieux secret d’alliance avec l’astre du jour.

Elle régénère, transforme, sublime, et pour peu que l’on soit digne d’être parmi ses hôtes elle vous comble avec prodigalité.

Une complicité offrant à nos évasions des ivresses joyeuses, des révélations occultes sur le berceau de nos existences. A l’intersection du ciel et de la terre se trouve cette respiration. Canopée triomphante, hêtraie cathédrale bâtie par le temps et les hommes. Eternel défi  aux frontières de la modernité toujours galopante.   

Alors, du plus profond de mon être je l’entends doucement murmurer, m’inviter à ses tentations. Elle me convoque. Une joie sourde m’envahit car je vais au devant du plus parfait abandon. A cet instant seulement mes premières pulsions me gouverne, plus rien d’autre ne compte.

Je me fais discret, puissant mon unique énergie à sa source. L’écouter seule me donne son rythme. Juste entre ciel et terre, il y a cette infinitude.