Lettre à Poutine

Cher Monsieur Poutine,
Je prends la plume pour vous faire part de ma profonde irritation de vous voir gesticuler dans des postures ridicules. Les heures sont trop graves et il m’insupporte moi de voir un tyran faire de la gonflette sur ses terrains de chasses préférés. La situation était à pleurer de rire jusque là, même si les Ukrainiens ne partagent pas votre sens du grotesque, mais il me semble que vous n’avez nullement l’intention d’arrêter de si tôt d’aussi plaisantes réjouissances. Blague à part, je pense que vous êtes au pouvoir depuis trop longtemps, et que depuis trop longtemps déjà vous n’êtes plus l’homme de la situation. J’ose même ajouter que vous ne l’avez jamais été en réalité. Certain diront que la Russie ne mérite pas autre chose qu’une personne de votre nature, qu’il lui faut immanquablement un dirigeant à la poigne de fer. Je crois au contraire que le peuple russe, qui aspire comme tous les peuples du monde au droit de vivre librement et dignement, mérite bien d’avantage qu’un éternel retour au passé autoritaire, liberticide et conquérant. Cette nostalgie-là, voyez-vous, à des relents nauséeux que les peuples ne veulent plus. Soyez-en sûr ! La grandeur d’une nation ne se mesure plus à l’aune de son armée et de sa flotte. Quel tsar déjà disait que c’était là ses deux alliés les plus fidèles ! Qu’importe ! Les coups de force ne sont plus de mise, les intimidations que vous agitez sont d’un autre âge. Non, vous n’êtes décidément plus l’homme de la situation. Monsieur Poutine, vous resterez aux yeux de tous comme celui qui a voulu recréer ce leurre effroyable, presque aussi monstrueux que l’autre éteint depuis 25 ans. Vous attisez donc le vent de l’histoire sur des cendres mortifères. Mais l’histoire ne ressert pas des plats aussi indigestes, malgré ce que vous pourriez croire, car ce sont les peuples qui décideront au final. La Russie est grande, vous ne l’êtes pas. Vous ne le serez jamais. KGBiste, apparatchik et néo-tsar, point oligarque mais richissime dit-on dans un pays où les inégalités sociales et la pauvreté fait flores. La Russie, état voyou ? Que ne commencez-vous pas par respecter les droits élémentaires de souveraineté des nations et de leurs territorialités ? La Crimée et le Donbass ne vous appartiennent pas, même au regard de l’histoire, et quand bien même serait-elle habitée par 60% de russophones vous ne faîte figure que d’intrus. J’ai en mémoire les souvenirs d’un âge sombre de notre histoire qui commençait à peu près comme vous êtes occupé de le faire, en déclarant vouloir « libérer » des russophones contre « l’oppression » ukrainienne. Rêvons, avec un peu de vision vous auriez pu être celui que votre peuple n’a jamais connu, un démocrate ! Mais vous ne serez donc qu’un pantin de plus de l’histoire que le peuple immolera tôt ou tard.